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Journaux
4 mars 2008

La belle de l'arrêt de bus

J'ai vécu un truc qui m'a touché aujourd'hui. Je vais pas essayer de l'interpréter, juste le décrire. Je vous demande juste de ne pas juger. Au niveau de la théorie j'ai complètement merdé. Mais j'ai ressenti quelque chose qui m'a marqué, et pour l'instant c'est ça qui compte pour moi.

J'arrive à Neuchâtel ce midi pour mes cours. J'ai très peu dormi cette nuit et je crois avoir accumulé beaucoup de tension ces derniers temps. Ma vie n'est pas rose et beaucoup de choses vont se jouer sous peu. Je mène en parallèle une course effrénée vers la compréhension et l'assimilation du Game. Enfin tout ça quoi.

Je descend du train, sors une cigarette. Pas de feu. Je vais jusqu'à mon arrêt de bus. J'ai vraiment besoin de feu. Je vois quelqu'un. Cigarette allumé. Je m'approche, elle lève les yeux vers moi. Elle est belle. Un peu de grunge dans son habilement. Cheveux roux éclatants. Elle enlève ses écouteurs, je suis encore dans mon monde et je crache "Tu as du feu s'il te plait ?". Elle me tend son briquet, j'allume ma cigarette et je m'assoit. Elle me regarde, je la regarde. On détourne tous les deux les yeux. Je reste là un peu coit à me demander ce qu'elle m'a fait. Normalement je devrai être en train de bouillir intérieurement en train d'imaginer mille scénarios et au final ne rien faire. Là non. je n'ose juste pas. On se regarde à nouveau, je soutiens le regard. Je me dis qu'un sourire devrait venir, une gène. Non. Ni elle, ni moi. Un premier bus arrive, ce n'est pas le mien. Je ressens qu'elle se demande si je vais monter dedans, je me pose la même question sur elle. Non.
Un deuxième bus arrive, c'est le mien, je me lève, je jette un regard furtif. Je monte. Mon intérieur bout quand même un peu et je me retourne en m'imaginant lui demander son numéro à la dernière minute. Elle me regarde sans me regarder vraiment. Au fond de moi je sais qu'elle est aussi en train de se demander qui je suis.
Je m'assied accompagné par la dernière folle idée théâtrale : sortir au prochain arrêt et revenir en arrière lui parler. Le peu de théorie que j'ai ingurgité dans le Game depuis que j'ai intégré la communauté me crie que ça ne PEUX pas marcher. Et pourtant au fond de moi je me dis "Je vais le faire". L'arrêt suivant est à 100m, le bus s'arrête et je descends. Je ne sais pas ce qui a créé en moi cette détermination et cette insouciance. L'adrénaline est présente mais je suis étonnamment calme, déterminé. Je vois qu'un autres bus vient de partir. Il passe à mes côtés. Elle est probablement dedans mais ça ne change rien pour moi. Je continue à marcher. Qu'elle soit là ou pas je sais que qqch a laché en moi. Peu importe quoi, on verra.
Elle n'est plus là. Ce n'est pas grave. Je me rend soudain compte qu'une énorme partie de la tension que j'ai accumulé ces derniers temps viens de lâcher. Il fait très froid. Juste avant c'était un calvaire, maintenant je me laisse aller. Mes jambes se mettent à trembler violemment. Je n'essaye pas de les en empêcher. Je tremble ainsi violemment pendant deux à trois minutes. Puis elles s'arrêtent. Je me sens réchauffé, serein.

D.

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